Vendredi dernier c'était la grande fête des sportifs au Conseil Général. Chaque sportif avec une performance reconnue par le Ministère Jeunesse et Sport recevait une bourse votée par l'assemblée départementale selon une formule de calcul précise. Exercice de soutien de l'activité sportive par des fonds publics ordinaire et sur lequel il y a peu de choses à redire.
D'autant que le CN Meschers représente 8 des 80 espoirs sportifs du département, tous sports confondus.
La voile est le sport phare du département maritime et pour cette discipline: 22 espoirs FFVoile listés sur le site du Ministère pour la Charente Maritime en 2013:
-8 du CN Meschers (17132), soit 4 équipages catamaran
-9 des clubs de La Rochelle (17000), dont 2 équipages catamaran
-2 d’Angoulins (17690)
-3 de Chatelaillon (17340), dont un équipage catamaran
Le grand écart de la répartition du matériel faite par le CDV17 ne répond pas à des critères élémentaires de transparence ni même à ses propres principes
Pour arriver à faire des résultats, la voile reste un sport mécanique, il faut du matériel. Le département de la Charente Maritime aide significativement sur ce point en finançant du matériel à hauteur de 50.000 euros par an.
C'est le Comité Départemental de Voile de la Charente Maritime (CDV17) qui administre la répartition de cette subvention et c'est cette administration qui mérite l'attention.
En effet, le tableau du CDV17 des répartitions des conventions ci-dessus illustre un grand-écart, ne serait-ce qu'avec la logique des critères d'attribution énoncés par le ... CDV 17 et les chiffres des listés espoirs sportifs 2013 ci-dessus:
"1er niveau « la performance » : le matériel le plus récent est affecté à des coureurs à fort potentiel, ayant déjà réalisé des performances et inscrits sur les listes « haut niveau » (jeune, espoir) ou respectant les critères « espoirs fédéraux »."
note: le concept "espoir fédéral" n'est pas défini par la
FFVoile.
Regardons de plus près le tableau et d'abord la logique CER (Centre d'Excellence de la Rochelle -pardon, le R signifie Régional-), le CEN ( Centre d'Excellence National situé à ... la Rochelle) qui peut permettre de comprendre la disproportion de la 1ère colonne de ce tableau et son incohérence totale avec le principe énoncé ci-dessus par le CDV17.
La logique ici, très discutable, au regard des résultats des jeunes du CNMeschers, est que le talent et "l'élite" départementale sont forcément rochelais.
Pour rappel en 2012 les 4 jeunes du département sélectionnés en équipe de France jeune catamaran étaient Michelais et hors du Centre d'Excellence Rochelais (CER).
Dans la seconde colonne (coureurs et équipes de club) on voit que les moyens sont déjà fortement concentré avant le dégagement de cette "élite".
Là, il faut pouvoir justifier d'un déséquilibre patent et malheureusement aucun document explicatif n'est disponible sur le site du CDV17 :
-un seul club dispose de 22 conventions sur 51 (soit plus que tous les autres bassins hors la Rochelle)
-un seul bassin, celui de La Rochelle concentre 39 des 51 conventions.
Il est facile de constater que le nombre de conventions n'est pas en rapport avec le nombre de sportifs reconnus par le Ministère.
Pour approfondir cette analyse, j'ai demandé au CDV17 une liste des attributaires avec valorisation de l'affectation du matériel issu de la subvention du Conseil Général.
C'est de l'argent public et l'accès aux documents administratifs (loi CADA) s'applique, nulle raison de douter d'une prompte réponse.
L'utilisation par le CDV17 de l'argent public du département sert-il à construire des déserts sportifs ?
Le mécanisme d'auto-alimentation est simple: en finançant le matériel des clubs d'un bassin, les jeunes sont devant et intègrent un CER/CEN et reçoivent encore plus...
A faire croire que le talent est réservé à un seul espace géographique.
A contrario, sans moyen les jeunes du reste du département font de la figuration, ils ramassent les bouées et les dynamiques locales s'essouflent rapidement.
Je reste concentré sur ce que nous pratiquons, cependant je pense que le catamaran est une illustration de ce qui se passe chez les dériveurs ou les planches à voile.
De manière concrète, il s'agit ici de comparer 4 jeunes Michelais qui se partagent 2 gréements usés (année 2008, valeur 1.000 euros) et de savoir, par exemple, à qui est attribué une plateforme
SL de fin 2012 (livrée sous mes yeux, valeur 11.000 euros) et plus largement de préciser quels clubs et compétiteurs bénéficient des plateformes SL payées avec l'argent public du département.
L'ironie de la situation est que les Michelaises avec ce vieux matériel gagnent systématiquement les régates dans la "capitale départementale" depuis un an (Coupe Nationale, épreuve de ligue de l'automne et celle du WE dernier).
La 3ème colonne est celle du développement sportif elle ne compense que pauvrement les déséquilibres lourds des deux premiers types d'aides (6 conventions sur 16 pour le bassin déjà le plus
favorisé).
Je fais partie de ceux qui considèrent qu'une aide publique se doit aussi de compenser des inégalités existantes.
L'argent du département de la voile itinérante procède de cette approche honorable.
Répartir l'argent commun afin de permettre un développement harmonieux sur le territoire s'avère un principe d'intérêt général.
Il s'agit de considérer de manière égale un jeune Royannais, Rochelais, Rétais ou Oléronnais du moment que les clubs qui disposent in fine de la délégation de services publics de la FFVoile, existent.
Si les aides ne font qu'accentuer les écarts, comme risque le montrer de manière encore plus significative, non pas le tableau ci-dessus qui euphémise le phénomène, mais celui avec des
valorisations les noms et les clubs qui en bénéficient, nous sommes alors dans une politique de rente de situation.
Un argent public qui irait presque exclusivement aux plus riches, aux plus gros, avec en prime, une logique sportive "décalée" par rapport aux critères du Ministère de tutelle de notre
fédération, pose questions sur le bon fonctionnement d'un organe déconcentré de la FFVoile.
Rappelons que ce sujet est la cause de la démission du précédent Président du CDV17. Guy Devaux (ex Directeur Technique National de la FFVoile, fonctionnaire de la Jeunesse et Sport à la retraite) n'arrivant pas à modifier des habitudes et un système ancien.
Enfin si l'on regarde de près, une grande place est laissée à l'arbitraire puisque, selon le texte du CDV 17:
"la réalisation de ces critères n’ouvre pas droit à une attribution automatique de matériel"
Franck Tiffon-Terrade
animateur sportif de club
administrateur de la FFVoile